Le mythe Ferrari, la cuisine du bon sens du célèbre chef étoilé, un lieu emblématique : trois éléments qui en
font une destination gastronomique inimitable
Il est difficile de trouver une combinaison qui représente le mieux le génie italien enfermé dans un seul lieu
comme celui que l’on rencontre lorsqu’on franchit le seuil du restaurant Cavallino à Maranello. Depuis
quelques mois, l’histoire de la Ferrari cohabite ici, à deux pas du musée et de l’usine, avec la cuisine du chef
le plus célèbre d’Italie, Massimo Bottura, qui, après avoir traversé l’autoroute, a poussé son savoir
gastronomique du centre de Modène vers les contreforts des Apennins dans la Trattoria del Cavallino
rampante, aujourd’hui réaménagée grâce à l’intervention de la designer et architecte franco-iranienne India
Mahdavi.
Une adresse pour le moins légendaire, qui attirait autrefois la curiosité des seuls passionnés d’automobile (le
salon privé d’Enzo Ferrari est toujours interdit aux clients de passage, mais pour les curieux, il vaut le
déplacement), elle offre aujourd’hui une double expérience au bord de l’émotion, celle du monde Ferrari,
entre affiches, photographies, pièces de voitures et moteurs, et la découverte d’une cuisine profondément
territoriale (mais pas seulement), avec des références de la Renaissance, revisitée avec l’élégance reconnue
et la capacité de synthétiser l’éthique et l’esthétique du chef modénais dans l’interprétation quotidienne du
talentueux Riccardo Forapani, né à Mirandola avec treize ans d’expérience dans les cuisines de La
Francescana. Mais allons-y dans l’ordre.L’arrivée au Cavallino suit les canons du déjà vu dans le salon Ferrari,
avec le rouge qui domine tout le bâtiment (pour ne pas dire tout Maranello) et le grand cheval noir qui
accueille les invités à la porte d’entrée.
En réalité, une fois la porte du restaurant franchie, on entre dans un monde qui évoque certains chefsd’œuvre cinématographiques de David Lynch, avec les couleurs pastel des canapés qui se mêlent aux chaises,
rouges bien sûr, de Vico Magistretti, récupérées du Golf Club de Carimate en Brianza et ensuite restaurées ;
ou encore avec les dessins et les géométries de style Fornasetti qui rappellent le pop art et les années
soixante. Un restaurant, Il Cavallino, à part entière, tout sauf une trattoria, mais avec les canons du bon sens
gastronomique local qui se nourrit de suggestions. En d’autres termes, à table ici, il faut commencer par le
Gnocco fritto, avec de la charcuterie et de l’erbazzone (à base d’herbes et d’épinards déshydratés), mais
ensuite les variations commencent, étant donné que nous ne sommes pas loin du circuit Ferrari, allant de la
crème caramel fondante au Parmigiano Reggiano 36 mois avec des oignons et du vinaigre balsamique
traditionnel Villa Manodori, au Scrigno di Tortellini, une tartelette de pâte brisée fermée par un disque de
pâte gravé avec le dessin de la rosace de la Cathédrale de Modène, et à l’intérieur les tortellini reposant sur
une base de viande bouillie mélangée avec une crème persuasive qui conduit le palais vers un cacio e pepe.
Un plat qui résume une grande partie de l’univers modénais de Bottura, notamment avec sa production de
pâtes fraîches faites maison de Il Tortellante, l’association de promotion sociale soutenant les enfants
autistes, qui, dans l’esprit du chef volcanique, pourrait à l’avenir devenir une marque exportable dans
diverses régions d’Italie.
Ensuite, à table, on passe au Carpaccio de langue avec ragoût d’escargots, caviar de Calvisius et ail doux, et
aux plats principaux plus décisifs, où se distinguent le classique et très riche Cotechino alla Rossini (un gibier
franco-émilien, avec foie gras, pain brioché, cerises et truffe noire, dans une référence visuelle qui rappelle
le Lièvre à la Royale) et l’Anguille au barbecue, farcie au pigeon, avec sauce au carpione et sauce giardinière.
En cuisine, Riccardo Forapani connaît bien le monde de la Bottura et a en même temps la capacité d’agir de
manière décisive sur des plats qui, dans de nombreux cas, atteignent l’estomac avant le cerveau, également
parce que Il Cavallino veut rester lié à un monde provincial fait de concrétude alimentaire et de saveurs
reconnaissables. À sa manière, et quelques mois seulement après le nouveau départ, le restaurant semble
vouloir tracer les pierres angulaires d’un nouveau style d’hospitalité et d’évolution de la cuisine locale sans
vouloir mettre l’histoire de côté. Au contraire, en perpétuant sa mémoire dans des plats qui ont toutes les
chances de devenir des classiques.